Walter Bouvais est entrepreneur et auteur. Il a cofondé en 2018, avec 3 autres entrepreneur.e.s, Open Lande, "Fabrique de projets" qui mobilise, forme et accompagne les porteurs de projets, les entreprises et territoires dans leur transformation écologique avec l'ambition de faire naître une économie régénérative, au service des humains et de la Terre.
À votre avis, de quels leviers les entreprises disposent-elles pour lutter contre le réchauffement climatique et le recul de la biodiversité ?
Les leviers sont nombreux. J'aimerais partager trois idées.
Tout d'abord, c'est à chacun de faire son chemin. Il n'y a pas une manière unique de réussir la mutation écologique des entreprises et organisations.
Ensuite, il y a un cadre clair pour travailler, qui renvoie à deux ou trois choses assez simples au fond : les frontières planétaires existent, elles sont documentées par la science. Nous pouvons toujours chercher à les braver mais, in fine, la réalité physique nous rattrapera. Réussir la transition suppose donc de comprendre et d'accepter ce cadre inédit et ambitieux.
Décarboner nos modèles d'affaires et préserver les ressources et la biodiversité ne sont plus des options. Ce sont les conditions sine qua non de la survie de notre civilisation, donc de nos activités économiques. On pourra toujours opposer qu'il est encore difficile de vraiment transformer l'économie tant que ce cadre physique ne sera pas "intégré" dans le cadre des règles humaines (loi, réglementation). C'est assez vrai. Mais n'ayons aucun doute sur le fait que ce nouveau cadre forme déjà le terrain de jeu de nombreux acteurs... qui n'attendent pas la loi pour s'y frotter et, ainsi, préparer l'avenir.
Enfin, il me semble que nous devons prendre les enjeux écologiques comme autant de défis à relever. Relever des défis, c'est précisément le talent des entrepreneur.e.s. Posons ce nouveau cadre, stimulons la créativité. Nous serons capables de réinventer le récit de la modernité, ainsi que les activités - nécessairement plus sobres - qui iront avec. Nous avons déjà de nombreux outils pour y arriver : diagnostics, outils de mobilisation, formation, Labs...
Ce qu'il faut maintenant, c'est du courage et de l'enthousiasme !
Pourquoi soutenez-vous l'initiative ?
Je soutiens cette initiative au nom d'Open Lande, car nous sommes convaincus qu'il faut clarifier ce cadre nouveau et aussi, accepter de renoncer au cadre de ce que l'on appelle "le monde d'avant". Ce cadre doit faire une place de choix au climat, tout en mettant cet enjeu en lien avec celui du vivant, de la biodiversité. La Convention 21 me semble poser d'emblée cette approche holistique.
L'acceptation de ce cadre ne peut être que collective, car changer le cadre, c'est changer les règles du jeu. Les cartes sont rebattues. Cela aiguise les appétits des nouveaux entrants. Dans le même temps, cela provoque la résistance des meilleurs joueurs du monde d'avant, qui ne veulent pas perdre leurs positions. Quoi de plus humain ?
Des gagnants, des perdants... Ce n'est pas très politiquement correct de le dire mais si nous ne posons pas cette hypothèse, nous manquons un facteur-clé de la réussite de cette transition. Car, au-delà des entreprises, il y a l'emploi, nos vies quotidiennes, la peur de ne pas réussir, la question de nos revenus, les rêves que nous projetons pour nous et nos enfants. C'est le facteur humain.
Pour vous, la Convention21 sera une réussite si…
Elle sera une réussite, d'abord, si elle permet d'en finir avec le scepticisme quant à la hauteur des enjeux écologiques. Tout est sur la table : nous avons la connaissance, partageons-là une fois pour toutes, car les scenarii que nous partagent les scientifiques sont vertigineux. Nous ne pouvons plus tergiverser. Ouvrons enfin l'ère de la décision informée !
Elle sera une réussite, ensuite, si elle permet comme je l'évoquais de poser ce que les uns et les autres ont à gagner et à perdre, afin de ne laisser personne au bord du chemin.
Elle sera une réussite, enfin, si l'on en sort avec de nouveaux récits autour de la modernité. Comprendre le fonctionnement du climat, du vivant, oser affirmer que l'on peut être à la fois dirigeant.e et aimer la Terre c'est furieusement moderne ! Faire du défi écologique, un défi de dirigeant.e et d'entrepreneur.e, ce n'est pas incompatible. C'est même une magnifique raison d'être.
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